Point juridique n°1 : les disparitions forcées

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« L’arrestation, la détention, l’enlèvement ou toute autre forme de privation de liberté par des agents de l’État ou par des personnes ou des groupes de personnes qui agissent avec l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État, suivi du déni de la reconnaissance de la privation de liberté ou de la dissimulation du sort réservé à la personne disparue ou du lieu où elle se trouve, la soustrayant à la protection de la loi »

Convention Internationale pour la Protection de toutes les Personnes contre les Disparitions Forcées (2010)

CONTEXTES

Contextes d’occurence

Guerre civile, conflits armés, lutte contre le terrorisme et le crime organisé, répression des opposants politiques, politique de la terreur, … Les disparitions forcées sont le signe de la défaillance de l’Etat et de l’inexistence de l’indépendance de la justice. Le premier recours à la pratique de la disparition forcée comme politique d’Etat remonte au programme Nacht und Nebel du IIIème Reich.

Les cibles

Opposants politiques, défenseurs des droits humains, juristes, journalistes, membres supposés d’un réseau criminel, citoyens ordinaires, … Tout le monde peut être victime de disparition forcée. Les proches des disparu.e.s sont aussi des victimes de ce crime.

En Algérie

L’arsenal de répression mis en place par le gouvernement algérien dans les années 1990 dans le cadre de la guerre anti-subversive a engendré la disparition de plus de 10 000 personnes. Depuis les années 2000, on observe de plus en plus de cas de disparitions de courte durée.

CONSÉQUENCES

Les disparitions forcées ont des conséquences physiques et psychologiques directes sur les victimes et leurs proches, telles que:

  • Torture physique au cours de la disparition
  • Torture psychologique sur les victimes (douleur prolongée pour les proches en attente)
  • Violences sexuelles favorisées par la soustraction à la protection de la loi
  • Risque de nouvelles disparitions (aussi dans l’entourage)
  • Mort

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Les disparitions forcées ont également des conséquences économiques, sociales et culturelles sur les proches des victimes de disparition : désintégration de la sécurité financière du foyer, obstacle à l’inscription administrative des enfants à l’école, obligations de signer une attestation de décès pour avoir droit aux indemnisatrions économiques, exclusion et catégorisation sociale, …

IMPLICATIONS LÉGALES

Selon le Pacte International relatif aux droits civils et politiques, une disparition forcée est une violation des libertés fondamentales, comme le :

  • Droit à la vie (art. 6)
  • Droit de ne pas être soumis à la torture (art. 7)
  • Droit à la liberté et la sécurité de sa personne (art. 9)
  • Droit de toute personne privée de sa liberté à être traîté avec humanité et dignité (art. 10)
  • Droit à la reconnaissance de la personnalité juridique (art. 16)
  • Droit au respect de la vie privée, familiale et du domicile (art. 17)

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Une disparition forcée peut constituer un crime contre l’humanité : « Avec la torture, les exécutions extrajudiciaires et l’esclavage, les DF font partie des violations les plus graves du droit international. Si celles-ci sont pratiquées de manière généralisée ou systématique à l’encontre d’une population civique quelconque et en application d’une politique d’un Etat, il s’agit d’un crime contre l’humanité. » (art. 5. de la Convention contre les disparitions forcées et art. 7 du Statut de Rome).

RATIFICATIONS

L’Algérie a signé la Convention contre les disparitions forcées mais ne l’a jamais ratifiée. L’Algérie n’est pas liée juridiquement par ce traité et n’est donc pas tenue de respecter les obligations énoncées dans ce texte. Les compétences de l’ONU sont ainsi limitées pour tenir responsables les auteurs de disparitions forcées.

L’Algérie a signé mais n’a jamais ratifié le Statut de Rome, elle n’est donc pas membre de la Cour Pénale Internationale (CPI). L’Algérie ne reconnaît pas la juridiction de la Cour, ce qui signifie que la CPI n’a pas automatiquement le pouvoir de poursuivre des auteurs de disparitions forcées en Algérie pour crime contre l’humanité.

COMMENT AGIR ?

Le 30 août est la Journée internationale des victimes de disparitions forcées. Venez assister à la semaine de sensibilisation organisée par la Fédaration euroméditérranéenne contre les disparitions forcées (FEMED) ! Pour soutenir la campagne, cliquez sur le lien en bio sur nos réseaux sociaux.


POUR EN SAVOIR PLUS…

  • Les Disparitions Forcées en Algérie : un crime contre l’humanité, Collectif des Familles des Disparus en Algérie
  • Algeria : Massive Obstacles to Reckoning with the Remnants of les années noirs: Impossible Truth, Justice and Recognition in Algeria, Regional Network for Historical Dialogue and Dealing with the Past
  • Waiting for Redress: The Plight of Victims of Enforced Disappearances in Algeria – A Baseline Study, MENA Rights Group
  • Fiche d’information No. 6 (Rev. 4) : Disparitions forcées, Nations Unies
  • Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, Assemblée générale des Nations Unies, Résolution 47/133